J.O. 130 du 5 juin 2005       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet
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Décision n° 2005-0267 du 24 mars 2005 modifiant la décision n° 2000-1171 du 31 octobre 2000 de l'Autorité quant à la méthode de calcul des coûts moyens incrémentaux de long terme relatifs à l'accès à la boucle locale


NOR : ARTT0500035S



L'Autorité de régulation des télécommunications,

Vu le règlement no 2887/2000 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2000 relatif au dégroupage de l'accès à la boucle locale ;

Vu la directive 2002/21 /CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques, dite « directive cadre », et notamment son article 27 ;

Vu la loi no 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, et notamment son article 133 ;

Vu la décision no 2000-1171 de l'Autorité de régulation des télécommunications, en date du 31 octobre 2000, prise en application de l'article D. 99-24 du code des postes et des télécommunications ;

Vu la décision no 2002-323 du 16 avril 2002 de l'Autorité de régulation des télécommunications, demandant à France Télécom d'apporter des modifications à son offre de référence pour l'accès à la boucle locale ;

Vu l'arrêt no 247866 du Conseil d'Etat, en date du 25 février 2005, France Télécom/Autorité de régulation des télécommunications, notifié à l'Autorité de régulation des télécommunications le 2 mars 2005 ;

Après en avoir délibéré le 24 mars 2005,



I. - Contexte

Le cadre juridique du dégroupage


Le nouveau cadre réglementaire introduit par la loi « communications électroniques » susvisée prévoit que l'Autorité conduit une analyse du marché du dégroupage à l'issue de laquelle elle détermine le contour du marché, l'opérateur exerçant une influence significative sur ce marché, ainsi que les obligations qu'il convient de lui imposer au titre de la régulation ex ante.

L'article 27 de la directive cadre susvisée introduit une période transitoire et dispose que « les opérateurs de réseaux téléphoniques publics fixes reconnus par l'Autorité réglementaire nationale comme puissants sur le marché de la fourniture de réseaux et de services téléphoniques publics fixes en vertu de l'annexe I, première partie, de la directive 97/33 /CE ou de la directive 98/10 /CE continuent d'être considérés comme des opérateurs notifiés aux fins du règlement européen (CE) no 2887/2000 jusqu'au terme de la procédure d'analyse visée à l'article 16, après quoi ils cessent d'être considérés comme tels aux fins dudit règlement ».

L'Autorité a lancé le processus d'analyse des marchés dès 2003. En ce qui concerne les marchés du haut débit, elle a réalisé en 2004 plusieurs consultations publiques et a soumis en particulier son analyse sur le marché du dégroupage au Conseil de la concurrence, dont elle a reçu les observations en février 2005.

Elle doit encore notifier ses projets de décisions à la Commission européenne et aux autres autorités réglementaires nationales afin de prendre en compte leurs observations, avant de pouvoir adopter ses décisions.

Concernant plus précisément la question de la tarification du dégroupage total, une consultation publique complémentaire se tiendra en avril et mai 2005, visant à définir la méthode de valorisation de la paire de cuivre et de tarification du dégroupage total valable pour la période à venir.

Par conséquent, en ce qui concerne les marchés du haut débit et en particulier le marché du dégroupage, le nouveau cadre introduit par la loi « communications électroniques » susvisée ne sera pleinement effectif qu'à l'issue du processus complet d'analyse des marchés.


L'annulation par le Conseil d'Etat

de la décision no 2002-323 susvisée


L'accès dégroupé à la boucle locale était régi dans l'ancien cadre par les articles D. 99-23 à D. 99-26 du code des postes et télécommunications. L'article D. 99-24 du code précisait notamment que « les éléments de réseaux sont valorisés à leurs coûts moyens incrémentaux de long terme » et que « L'Autorité établit et rend publique la nomenclature des coûts pertinents. Elle définit et publie la méthode de calcul des coûts moyens incrémentaux de long terme ».

Le 30 octobre 2000, l'Autorité a pris, en application de l'article D. 99-24 du code, une décision no 2000-1171 définissant la nomenclature des coûts pertinents, ainsi qu'en annexe la méthode de calcul des CMILT.

Le 16 avril 2002, l'Autorité a, par sa décision no 2002-323, modifié les tarifs du dégroupage de France Télécom en utilisant une méthode de tarification tenant compte d'une assiette du développement prospectif du dégroupage, qui n'était pas précisée dans la décision no 2000-1171.

Le Conseil d'Etat a annulé dans son arrêt du 25 février 2005 susvisé l'article 3 de la décision no 2002-323 précitée, en tant qu'il fixe les tarifs maxima de l'abonnement mensuel pour la fourniture de l'accès total et de l'accès partagé à la boucle locale. Il a ainsi considéré que l'Autorité dans sa décision no 2002-323 avait « décidé que les tarifs proposés par France Télécom dans son offre de référence ne devaient plus être appréciés au regard du coût moyen de "l'ensemble des lignes de cette entreprise, mais devaient être appréciés au regard des coûts moyens de deux ensembles de lignes, pondérés pour tenir compte de la probabilité de dégroupage effectif de ces lignes dans un proche avenir ; que ce faisant l'Autorité de régulation n'a pas respecté les règles de calcul des coûts incrémentaux de long terme qu'elle avait fixées dans sa décision précitée du 31 octobre 2000 ».

Toutefois, le Conseil d'Etat a décidé que cette annulation ne prendra effet qu'à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de sa notification, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date de la présente décision contre des actes pris sur le fondement des dispositions annulées.


L'objet de la présente décision


Afin de mettre le dispositif juridique du dégroupage en conformité avec l'arrêt du Conseil d'Etat et d'assurer un maximum de sécurité juridique et de confiance à l'ensemble des acteurs dans l'attente de l'issue de l'analyse du marché du dégroupage, il apparaît nécessaire de modifier la décision no 2000-1171 susvisée.

La présente décision a donc pour objet d'introduire dans la méthode de calcul des coûts du dégroupage définie par la décision no 2000-1171 susvisée une assiette géographique, telle qu'utilisée dans la décision no 2000-323 précitée, permettant de tenir compte des probabilités de déploiement du dégroupage et de calculer ainsi une moyenne pondérée des coûts du dégroupage total. Elle modifie donc la décision no 2000-1171 de l'Autorité en ce sens, en y précisant l'assiette géographique qu'il convient d'appliquer pour la méthode de calcul des coûts du dégroupage, et qui justifie les tarifs du dégroupage total à ce jour. Aucune autre modification n'y est apportée.

Cette méthode amendée aura cours jusqu'à ce que l'Autorité prenne, le cas échéant, à l'issue des travaux de consultation publique engagés et en application de l'analyse des marchés, une nouvelle décision fixant la méthode de calcul des coûts du dégroupage total valable pour la période à venir.


II. - La prise en compte

de l'extension géographique du dégroupage

Principe


Les travaux du groupe « méthodes et fixation des tarifs » du groupe Bravo relatifs aux conditions tarifaires du dégroupage de 2001 et 2002 ont mis en lumière la nécessité de distinguer le coût moyen de l'ensemble des lignes et le coût des lignes effectivement dégroupées par les opérateurs alternatifs, qui se déploient très progressivement.

En effet, l'économie du dégroupage est déterminée en grande partie par les coûts fixes supportés par les opérateurs pour équiper chaque site pour le dégroupage. Les opérateurs cherchent de ce fait à couvrir en premier lieu les zones pour lesquelles un site équipé dessert le plus grand nombre possible de clients potentiels, afin de rentabiliser ces investissements. Le déploiement du dégroupage se fait donc progressivement, des zones les plus denses vers les zones les moins denses.

Cette stratégie de déploiement progressif a été suivie par les opérateurs depuis plusieurs années : le dégroupage couvrait environ 130 répartiteurs début 2003, 400 début 2004, et s'est étendu à un peu moins de 900 répartiteurs début 2005, sur les 12 000 que compte le réseau de France Télécom. Le dégroupage permettait au début de l'année 2005 de couvrir environ la moitié de la population.

La couverture restreinte du dégroupage et son extension nécessairement progressive doivent être prises en compte dans la tarification du dégroupage, afin de respecter le principe d'orientation vers les coûts.

L'obligation d'orientation vers les coûts des tarifs du dégroupage revêt en effet deux aspects. Le premier et le plus immédiat conduit à faire en sorte que le prix de la prestation soit établi en fonction des coûts supportés par l'opérateur pour la produire. Mais elle doit également faire en sorte que le prix facturé pour la prestation corresponde effectivement à la prestation offerte. L'article 3 du règlement européen précise en effet que « l'offre est suffisamment dégroupée pour que le bénéficiaire n'ait pas à payer pour des éléments ou des ressources du réseau qui ne sont pas nécessaires à la fourniture de ses services ».

Ainsi, pour la tarification du dégroupage, il convient de tenir compte de son extension géographique évaluée de façon prospective.


Les règles de pertinence des coûts


Les coûts pertinents à retenir pour la tarification de l'accès dégroupé sont ceux correspondant, de façon prospective, au service effectivement utilisé par les opérateurs ayant recours au dégroupage. Ainsi, il est nécessaire de définir une assiette géographique de déploiement anticipé du dégroupage.

Le coût par ligne du dégroupage peut être évalué dans un premier temps sur cette assiette restreinte de lignes ; il convient cependant dans ce cas de tenir compte des probabilités, même faibles, de déploiement du dégroupage en dehors de ce bassin. Ainsi, le tarif du dégroupage retenu in fine est une moyenne pondérée des coûts de lignes sur ces deux zones, denses et peu denses, la pondération étant fondée sur les probabilités estimées de déploiement des opérateurs sur ces zones.

Dans une approche prospective, l'Autorité a estimé en 2002 qu'il était très peu probable que le dégroupage se déploie au-delà d'une assiette de 21 millions de lignes. Cette position se trouve confortée aujourd'hui à l'épreuve des faits. Elle a estimé que 95 % des lignes seraient dégroupées dans l'assiette de 21 millions de lignes, et 5 % en dehors.

Afin de prendre en compte cette contrainte de déploiement dans la tarification du dégroupage, il convient de modifier en conséquence la décision no 2000-1171 susvisée, et plus précisément ses annexes I et II approuvées respectivement par les articles 1er et 2 de cette décision,

Décide :


Article 1


L'annexe I, partie III « Règles de pertinence », approuvée par l'article 1er de la décision no 2000-1171 susvisée est modifiée comme suit. Avant le paragraphe a « Les coûts de l'accès totalement dégroupé », sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Les coûts pertinents à retenir pour la tarification du dégroupage sont ceux correspondant, de façon prospective, au service effectivement utilisé par les opérateurs ayant recours au dégroupage.

Ils doivent donc être fondés sur une assiette géographique anticipant de façon prospective le déploiement du dégroupage. »

Article 2


L'annexe II approuvée par l'article 2 de la décision no 2000-1171 susvisée est ainsi modifiée :


I. - Partie I-1

Définition


Un alinéa rédigé comme suit est inséré après le quatrième paragraphe :

« Conformément aux règles de pertinence établies pour l'accès dégroupé, les coûts de long terme retenus pour le dégroupage doivent être fondés sur une assiette géographique anticipant de façon prospective le déploiement du dégroupage, afin que l'opérateur ne paie, et que France Télécom ne soit rémunérée, que pour les services effectivement rendus. »


II. - Partie I-2

Mise en oeuvre


Après le quatrième alinéa, il est inséré l'alinéa suivant :

« - la couverture géographique probable du dégroupage : les coûts pertinents de réseau retenus doivent correspondre à la couverture probable, estimée de façon prospective, du dégroupage. »


III. - Partie III-2

Les paramètres de la modélisation


Les paragraphes suivants sont insérés avant la sous-partie « La durée de vie des équipements » :


« L'assiette géographique


Une assiette de déploiement probable du dégroupage est déterminée de façon prospective.

Le coût par ligne du dégroupage peut être évalué dans un premier temps sur cette assiette restreinte de lignes ; il convient cependant dans ce cas de tenir compte des probabilités, même faibles, de déploiement du dégroupage en dehors de ce bassin. Ainsi, le tarif du dégroupage retenu in fine est une moyenne pondérée des coûts de lignes sur ces deux zones, denses et peu denses, la pondération étant fondée sur les probabilités estimées de déploiement des opérateurs sur ces zones. »


Article 3


Le directeur général est chargé de l'exécution de la présente décision, qui sera publiée au Journal officiel de la République française.


Fait à Paris, le 24 mars 2005.


Le président,

P. Champsaur